LA DEVOTION A LA VIERGE DE VELANKANNI : LA SIGNE EMBLEMATIQUE

DE L’AUMONERIE CATHOLIQUE TAMOULE INDIENNE DE FRANCE

Velankanni Mata est vénérée par les tamouls comme la Vierge de Tamil Nadu. Elle a choisi le petit village tamoul de Velankanni, près de Pondichéry, pour répandre ses bienfaits. Son culte, initié par les Portugais arrivés sur la Côte de Coromandel au début du XVIIe siècle, s’est développé au fil des siècles. Connue sous le nom de Mère de la Bonne Santé ou Arockya Mâtâ, cette Vierge thaumaturge connaît aujourd’hui un succès croissant. Ce succès se manifeste particulièrement lors de sa fête patronale, célébrée du 29 août au 8 septembre, attirant des pèlerins hindous et chrétiens de toutes les régions de l’Inde. Environ 20 millions de pèlerins visitent chaque année le sanctuaire de Velankanni, au sud-est de l’Inde, faisant de ce lieu d’apparition mariale l'un des plus fréquentés au monde. La Vierge de Velankanni, connue sous le nom d'Arockya Mâtâ, qui signifie Mère de la Santé, est priée pour obtenir des guérisons physiques, psychologiques et spirituelles.

À l’origine de cette dévotion, trois miracles se produisirent au milieu du XVIe siècle à Velankanni, près de Pondichéry, ancienne capitale de l’Inde française.

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« Le Berger endormi »Vers 1580, la Vierge apparaît pour la première fois à un berger endormi près d’un étang, au pied d’un bananier. Cet enfant, chargé de livrer du lait à son maître, est réveillé par une lumière éclatante émanant d'une belle dame tenant un enfant dans ses bras. Cette dame lui demande s’il peut lui donner le lait qu’il transporte pour nourrir son enfant. Le berger, ne pouvant refuser, tend le pot à la dame et repart avec ce qui reste. À son arrivée chez son maître, l’enfant s’excuse de la petite quantité de lait rapportée et raconte sa rencontre. Sceptique mais curieux, le maître ouvre le pot et découvre qu’il est rempli à ras bord. Criant au miracle, le berger et son maître se rendent à l’étang et se prosternent pour vénérer la Vierge.

« L’enfant boiteux » Quelques années plus tard, vivait à Velankanni une pauvre veuve et son fils boiteux. La mère envoyait son fils chaque jour sur un monticule situé près d’une route et d’un bananier pour vendre le babeurre qu’elle produisait. Un jour, l’enfant voit apparaître une dame et un nourrisson entourés d’une lumière éclatante. La belle femme demande au garçon s’il veut bien lui donner une tasse. Le boiteux, heureux de servir une si ravissante cliente, lui offre une grande tasse à boire. La dame lui demande alors d’aller à Nagapattinam pour dire à un riche catholique de bâtir une chapelle en son nom. L’enfant répond que son handicap l’empêche de se déplacer aisément, mais à l’invitation de Marie, il se lève et marche sans problème. C’est depuis cette période du XVIe siècle que la Vierge Marie est connue sous le nom de Notre-Dame de la Bonne Santé.

« Les marins portugais » Au XVIIe siècle, un navire marchand portugais en route de Macao à Colombo est pris dans une violente tempête au large de la côte orientale de l’Inde. Les marins prient la Vierge Marie de les sauver de cette situation périlleuse. Ils atteignent Velankanni en toute sécurité et y bâtissent une église en bord de mer. Au fil du temps, la ville devient un lieu de passage important pour de nombreuses flottes, et le sanctuaire construit par les miraculés est agrandi à plusieurs reprises par les Portugais.

La dévotion propagée par les femmes fragilisée

Les habitants de Pondichéry ont une vénération particulière pour Velankanni Arockya Mâtâ. Elle est présente sur tous les autels domestiques, illustrée sur des chromos ou des calendriers accrochés aux murs. Les Pondichériens de France ont conservé une grande foi en la Vierge de Velankanni qu’ils transmettent à leurs enfants à travers des séances de prières programmées le soir autour de l’autel domestique. Respectant la tradition, les activités religieuses familiales sont sous la responsabilité de la mère, gardienne du foyer et du bien-être familial, fonction qu’elle transmet à ses filles. La Vierge de Velankanni est au cœur des prières à chaque événement perturbant la vie familiale. Les occasions ne manquent pas, et elles s’accentuent à mesure que les enfants grandissent. Traditionnellement, élevés dans un contexte familial et social privilégiant le religieux, les Pondichériens accordent d’autant plus d’importance à l’espace religieux qu’il leur offre un soutien face aux difficultés de la vie quotidienne en France. Les préoccupations liées aux études (échec scolaire, éducation française exacerbant l’individualisme, mauvaises fréquentations), au chômage et aux difficultés à conclure un mariage arrangé sont autant de problèmes qui s'ajoutent à la difficulté de vivre en France.

Les femmes constituent la catégorie la plus fragilisée par cette situation. Souvent, elles parlent peu ou pas du tout le français, n’ont pas de vie extérieure et restent confinées et esseulées dans leur appartement une grande partie de la journée. Cette situation concerne non seulement les femmes des primo-arrivants, mais elle est sans cesse réactivée par les jeunes épouses arrivant du Tamil Nadu, principalement de Pondichéry. Ces difficultés favorisent les activités religieuses qui créent des liens communautaires, permettent de retrouver une atmosphère indienne et d’établir des contacts pour les futures alliances des enfants, en particulier des filles. Elles se traduisent également par l’installation de statues de la Vierge de Velankanni dans les paroisses, assurant la protection et le bien-être de la famille et de la communauté.

Originaire du même pays, la Vierge est perçue comme particulièrement apte à les aider, car elle comprend bien les difficultés des Tamouls : « On se sent proche d’elle comme de quelqu’un de notre famille. Quand on a des problèmes, on peut aller à l’église et lui parler. On lui parle en tamoul et elle comprend nos problèmes car elle les connaît. Elle seule peut nous aider. C’est pour cela qu’on l’a installée dans l’église, car elle peut aussi aider les autres familles pondichériennes qui habitent ici », dit une jeune femme.

L’aumônerie indienne ainsi que dix paroisses dispersées en Île-de-France possèdent une image de la Vierge de Velankanni. La plupart des statues résultent d’une transaction votive (guérison, travail en France, bien-être familial ou manifestation d’une forte dévotion). Les propos récurrents traduisent l’homologie culturelle entre la Vierge et les Pondichériens (Tamouls). Photo: R. Vengadesh

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